C E D R E G I



Pour traiter du problème du sacerdoce ministériel et du sacerdoce des laïcs, il existe évidemment plusieurs manières. On peut aborder la question en exégète, ou en théologien, ou en canoniste ou même simplement en mystique. Ces quatre voies seront utilisées ici, dans un exposé divisé en deux grandes parties.


Dans un premier temps seront rappelés les textes essentiels de l’enseignement de l’Église, tant ceux de l’Écriture : Ancien et Nouveau Testament, que ceux de la Tradition : conciles, encycliques et lettres des Papes. La seconde partie pourra alors tenter de présenter la façon dont cet enseignement de l’Église, et surtout, bien sûr, celui de Vatican II, est traduit dans le code de droit canonique entré en vigueur en 1983. Évidemment, un code de lois, fût-il un code de lois ecclésiastiques, a ses limites et ses nombreuses prescriptions risquent de dérouter à la longue les non canonistes et de leur faire oublier quelque peu l’essentiel. C’est pourquoi il sera opportun, en terminant, de retourner du code à son inspirateur principal, c’est-à-dire le concile Vatican II, et même de demander à un théologien orthodoxe de nous entraîner vers la contemplation mystique du rôle des laïcs.



____________



PREMIÈRE PARTIE. L’ÉCRITURE ET LA TRADITION 



Puisque les deux sources de la révélation sont l’Écriture et la Tradition, ce sont à elles que bien évidemment un chrétien va s’adresser pour connaître et comprendre le sacerdoce ministériel et le sacerdoce des laïcs.


I.                    L’ÉCRITURE


A.    L’Ancien Testament


Deux textes sont à relever.


1)     Le premier est tiré du livre de l’Exode (Ex 19/6). Arrivés au Sinaï après leur sortie d’Égypte, « les enfants d’Israël … campèrent dans ce désert. Israël établit là son camp, en face de la montagne. Moïse alors monta vers Dieu. Yahvé l’appela de la montagne et lui dit : ‘Voici en quels termes tu parleras à la maison de Jacob : … Désormais, si vous m’obéissez et respectez mon alliance, je vous tiendrai pour miens parmi tous les peuples … Je vous tiendrai pour un royaume de prêtres et une nation consacrée’. »


2)     Le second texte est un passage du livre d’Isaïe (Is 61/6). « L’esprit du Seigneur Yahvé est sur moi, car Yahvé m’a oint. Il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres … annoncer une année de grâce de la part de Yahvé … Et vous, vous serez appelés ‘prêtres de Yahvé’, on vous nommera ministres de notre Dieu ».


Le sacerdoce commun des enfants d’Israël s’étend, dans le Nouveau Testament, à tous les fidèles du Christ.



B.     Le Nouveau Testament


1)     Saint Pierre, dans sa première épître (1P 2/5, 9), déclare à l’adresse des chrétiens : « Approchez-vous (du Seigneur Jésus), lui, la pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie, précieuse auprès de Dieu. Vous-mêmes, comme pierres vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel, pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-Christ … Vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour annoncer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu ».


2)     Saint Jean, dans l’Apocalypse, fait connaître aux sept Églises d’Asie la « révélation de Jésus-Christ » : « Il nous a aimés et nous a lavés de nos péchés par son sang, il a fait de nous une Royauté de Prêtres pour son Dieu et Père » (Ap 1/6), ce que les quatre Vivants et les vingt-quatre vieillards proclament à leur tour, dans leur cantique à l’Agneau : « Tu rachetas pour Dieu, au prix de ton sang, des hommes de toute race, langue, peuple et nation ; tu as fait d’eux pour notre Dieu une Royauté de prêtres régnant sur la terre » (Ap 5/10).



II.                  LA TRADITION


Il faut bien reconnaître, lorsqu’on aborde la Tradition, que le magistère de l’Église ne s’est guère penché sur les problèmes propres des laïcs avant le 2° concile du Vatican. Il y a à cela de multiples raisons, qui tiennent à l’histoire, et qu’il n’est pas possible ni utile de développer ici.


1)     Le concile de Trente (1545-1563) expose, dans sa session XXIII, la doctrine du sacrement de l’ordre. Après avoir rappelé que l’ordre, précisément, est un sacrement, le concile ajoute : « Parce que dans le sacrement de l’ordre, comme dans le baptême et la confirmation, est imprimé un caractère, qui ne peut être ni détruit ni ôté, le Saint Concile condamne à juste titre l’opinion de ceux qui prétendent que les prêtres du Nouveau Testament n’ont qu’un pouvoir temporaire et qu’une fois ordonnés ils peuvent redevenir laïcs s’ils n’exercent pas le ministère de la Parole de Dieu. De même si quelqu’un affirme que tous les chrétiens sont indistinctement prêtres du Nouveau Testament, ou que tous sont revêtus d’un pouvoir spirituel égal pour chacun, il ne fait rien d’autre que de détruire la hiérarchie de l’Eglise », cette hiérarchie de l’Ordre qui comprend d’abord les évêques et ensuite les prêtres (Dz 960).


2)     Le premier concile du Vatican, on le sait, n’a pas eu le temps, en raison de la guerre de 1870, de terminer ses travaux. La Constitution dogmatique sur l’Église du Christ s’est donc limitée par la force des choses au primat du Pontife Romain et à son infaillibilité. Elle n’a rien dit sur les laïcs.


3)     L’encyclique sur le sacerdoce catholique, du Pape Pie XI, en date du 20 décembre 1935, qui est un texte admirable sur le prêtre « autre Christ », « qui continue en quelque manière Jésus-Christ même », ne parle pas des laïcs.


4)     Le second concile du Vatican, par contre, a longuement et à maintes occasions évoqué le sacerdoce ministériel et le sacerdoce des fidèles. Quelques textes essentiels sont à citer :


a - Le premier distingue nettement le sacerdoce hiérarchique et le sacerdoce des fidèles : « Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, qui ont entre eux une différence essentielle et non seulement de degré, sont cependant ordonnés l’un à l’autre : l’un et l’autre, en effet, chacun selon son mode propre, participent de l’unique sacerdoce du Christ. Celui qui a reçu le sacerdoce ministériel jouit d’un pouvoir sacré pour former et conduire le peuple sacerdotal, pour faire, identifié au Christ (in persona Christi, mal traduit par « dans le rôle du Christ » ou encore par « au nom du Christ en personne »), le sacrifice eucharistique et l’offrir à Dieu au nom du peuple tout entier ; les fidèles, eux, de par le sacerdoce royal qui est le leur, concourent à l’offrande de l’Eucharistie et exercent leur sacerdoce par la réception des sacrements, la prière et l’action de grâce, le témoignage d’une vie sainte, et par leur renoncement et leur charité effective » (Lumen Gentium, n° 10).


b - Un autre passage de Lumen Gentium (n° 11) déclare que « les baptisés …, par la régénération et l’onction du Saint-Esprit, sont consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint, de façon à offrir, par le moyen des activités du chrétien, autant de sacrifices spirituels, en proclamant les merveilles de celui qui des ténèbres les a appelés à son admirable lumière [cf. 1P2/4-10] ».


b - Un autre passage de Lumen Gentium (n° 11) déclare que « les baptisés …, par la régénération et l’onction du Saint-Esprit, sont consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint, de façon à offrir, par le moyen des activités du chrétien, autant de sacrifices spirituels, en proclamant les merveilles de celui qui des ténèbres les a appelés à son admirable lumière [cf. 1P2/4-10] ».


c - La Constitution Presbyterorum Ordinis reprend le même enseignement : « Le Seigneur Jésus, que le Père a sanctifié et envoyé dans le monde, fait participer tout son Corps mystique à l’onction de l’Esprit qu’il a reçue : en lui, tous les chrétiens deviennent un sacerdoce saint et royal, offrant des sacrifices spirituels à Dieu par Jésus-Christ, et proclament les hauts faits de Celui qui les a appelés des ténèbres à son admirable lumière. Il n’y a donc aucun membre qui n’ait sa part dans la mission du Corps tout entier ; il n’y en a aucun qui ne doive sanctifier Jésus dans son cœur et rendre témoignage à Jésus par l’esprit de prophétie.


Mais le même Seigneur, voulant faire des chrétiens un seul corps, où tous les membres n’ont pas la même fonction (Ro 12/4), a établi parmi eux des ministres qui, dans la communauté des chrétiens, seraient investis par l’Ordre du pouvoir sacré d’offrir le Sacrifice et de remettre les péchés, et y exerceraient publiquement pour les hommes la fonction sacerdotale » (n° 2).


5)     Après le Synode de 1971, le Pape Paul VI a publié un document intitulé « De sacerdotio ministeriali » (Le sacerdoce ministériel).


6)     A l’occasion du Jeudi Saint de 1979, le Pape Jean-Paul II a adressé une lettre à tous les prêtres. Ce document permettra dans un instant de conclure cet exposé sur la Tradition.


7)     L’exhortation sur la famille, « Familiaris consortio », du Pape Jean-Paul II, en date du 22 novembre 1981, contient des pages très riches sur « la participation de la famille chrétienne à la mission prophétique, sacerdotale et royale de Jésus-Christ et de son Église ». Cette participation, écrit Jean-Paul II, a « une référence triple, mais à vrai dire unique, à Jésus-Christ, Prophète, Prêtre et Roi », car la famille est « une communauté qui croit et évangélise ; une communauté en dialogue avec Dieu ; une communauté au service de l’homme » (n° 50 à 64).


8)     Enfin le Code de 1983 apporte, selon son mode propre, sa contribution à la présentation et à la mise en œuvre du sacerdoce ministériel et du sacerdoce des laïcs.


Avant toutefois d’ouvrir le Code, il est bon de relire certains passages de la lettre de Jean-Paul II aux prêtres à l’occasion du Jeudi Saint 1979, qui sont comme une synthèse de l’enseignement de l’Église sur le sacerdoce ministériel et le sacerdoce des fidèles :


« Lorsqu’on analyse avec attention les textes conciliaires, il apparaît clairement qu’il faut parler d’une triple dimension du service et de la mission du Christ plutôt que de trois fonctions différentes… C’est de cette triple unité que découle notre participation à la mission et à la fonction du Christ…


Le sacerdoce auquel nous participons par le sacrement de l’Ordre, qui a été imprimé à jamais dans nos âmes par un signe particulier de Dieu, le caractère, est en relation explicite avec le sacerdoce commun des fidèles, c’est-à-dire de tous les baptisés, mais en même temps il y a entre eux une différence essentielle et non seulement de degré…


Le sacrement de l’Ordre, pour nous spécifique, fruit de la grâce particulière de la vocation et fondement de notre identité, … sert à rendre les fidèles conscients de leur sacerdoce commun et à leur permettre de l’exercer…


Notre sacerdoce sacramentel est donc à la fois hiérarchique et ministériel. Il constitue un ministerium particulier, c’est-à-dire un service à l’égard de la communauté des croyants … Notre sacerdoce est hiérarchique, c’est-à-dire lié au pouvoir de former et de conduire le peuple sacerdotal … »


En promulguant le Code quelques années plus tard, le 25 janvier 1983, Jean-Paul II écrivait : « Si le Concile Vatican II a tiré du trésor de la Tradition de l’ancien et du nouveau …, il est clair que le Code doit refléter cette même nuance de fidélité dans la nouveauté et de nouveauté dans la fidélité, et s’y conformer dans son propre domaine et dans sa façon particulière de s’exprimer ». On peut dire que le Code, dont il est temps de parler, correspond au vœu du pape et qu’il est une excellente traduction, dans le domaine juridique, de l’enseignement du concile Vatican II. 



____________



DEUXIÈME PARTIE


LA TRADUCTION CANONIQUE DE L’ENSEIGNEMENT DE VATICAN II : LE CODE


Comme l’indique le Pape Jean-Paul II dans la Constitution apostolique « Sacrae Disciplinae Leges » par laquelle il promulgue le nouveau code de droit canonique, le 25 janvier 1983, ce code met en relief, entre autres, « la doctrine selon laquelle tous les membres du Peuple de Dieu, chacun selon sa modalité, participent à la triple fonction du Christ : les fonctions sacerdotale, prophétique et royale. A cette doctrine se rattache celle concernant les devoirs et les droits des fidèles et en particulier des laïcs ». 


Dans un premier temps consacré aux prescriptions juridiques du Code, chacune de ces trois fonctions sera examinée, avec tout d’abord la présentation des principes qui la régissent, puis l’énumération des principales réalisations concrètes de ces principes, plus spécialement en ce qui concerne les laïcs. 


Il faudra cependant dans un second temps remonter vers l’au-delà du Code, retrouver à nouveau la théologie qui a inspiré le Code et même la mystique qui peut la vivifier. *



*    *


I.                    LES PRESCRIPTIONS JURIDIQUES DU CODE


§ 1. La fonction sacerdotale du Christ = La fonction de sanctification de l’Église (Livre IV). 


Comme l’indique le c. 834 § 1, « l’Église remplit sa fonction de sanctification d’une manière particulière par la sainte liturgie qui, en vérité, est considérée comme l’exercice de la fonction sacerdotale de Jésus-Christ ; la sanctification des hommes y est signifiée par des signes sensibles et réalisée selon le mode propre à chacun d’eux, et le culte public intégral de Dieu y est célébré par le Corps mystique de Jésus-Christ, Tête et membres ». 


Le c. 836 ajoute plus loin que « … le culte chrétien, dans lequel s’exerce le sacerdoce commun des fidèles, est une œuvre qui procède de la foi et s’appuie sur elle… » 



A.    Les principes 


1)     Les ministres sacrés 


« La fonction de sanctification est exercée avant tout par les Évêques, qui sont les grands prêtres, les principaux dispensateurs des mystères de Dieu et, dans l’Église qui leur est confiée, les modérateurs, les promoteurs et les gardiens de toute la vie liturgique » (c. 835 § 1). 


« Les prêtres, eux aussi, exercent cette fonction, car participant eux-mêmes au sacerdoce du Christ, en tant qu’ils sont ses ministres sous l’autorité de l’évêque, ils sont ordonnés pour célébrer le culte divin et sanctifier le peuple » (c. 835 § 2). 


2)     Les autres fidèles 


« Les autres fidèles ont aussi leur part propre à la fonction de sanctification, en participant activement, selon leur manière propre, aux célébrations liturgiques et surtout à la célébration eucharistique ; les parents participent à cette même fonction de façon particulière, en vivant leur vie conjugale dans un esprit chrétien et en donnant une éducation chrétienne à leurs enfants » (c. 835 § 4).


Note : les évêques et les prêtres exercent la fonction de sanctification, les fidèles y participent. 



B.     Principales réalisations concrètes, spécialement pour les laïcs 



1)     Participation active des fidèles aux actions liturgiques (c. 837 § 2). 


2)     « Les pasteurs d’âmes et les autres fidèles, chacun selon sa fonction ecclésiastique, ont le devoir de veiller à ce que les personnes qui demandent les sacrements soient préparées à les recevoir par l’évangélisation voulue et la formation catéchétique, en observant les règles établies par l’autorité compétente » (c. 843 § 2). 


3)     Les parents ont le devoir de faire baptiser leurs enfants dès les premières semaines (c. 867 § 1), de « veiller à ce que les enfants qui sont parvenus à l’âge de raison soient préparés » à recevoir d’Eucharistie, « après avoir fait une confession sacramentelle » (c. 914) ainsi qu’à recevoir la confirmation 


4)     Les c. 872, 874 concernent les parrains de baptême, le c. 892 vise les parrains de confirmation (on ne peut donner ici toutes les règles en détail…). 


5)     A propos du mariage, le c. 1063 édicte que « les pasteurs d’âmes sont tenus par l’obligation de veiller à ce que leur propre communauté d’Église fournisse aux fidèles son assistance pour que l’état de mariage soit gardé dans l’esprit chrétien et progresse dans la perfection », ceci par la prédication, la catéchèse, l’aide apportée aux époux etc… 


6)     Etc., etc. 


§ 2. La fonction prophétique du Christ = La fonction d’enseignement de l’Église (Livre III) 


C’est à Lumen Gentium qu’il faut ici recourir : « Le Christ, qui par le témoignage de sa vie et la puissance de sa parole a proclamé le royaume du Père, accomplit sa fonction prophétique jusqu’à la pleine manifestation de sa gloire, non seulement par la hiérarchie qui enseigne en son nom et avec son pouvoir, mais aussi par les laïcs dont il fait pour cela également des témoins en les pourvoyant du sens de la foi et de la grâce de la parole » (n° 35). 



A.    Les principes


Les ministres sacrés : Pape, évêques, prêtres ont pour mission propre l’enseignement, tandis que les laïcs peuvent coopérer avec eux dans l’exercice du ministère de la parole. 


1)     Les ministres sacrés 


a - Le Pape : « En ce qui concerne l’Église tout entière, la charge d’annoncer l’Evangile est confiée principalement au Pontife Romain et au Collège des Évêques » (c. 756 § 1). 


b - Les évêques : « En ce qui concerne l’Église particulière qui lui est confiée, chaque évêque y exerce cette charge en tant qu’il y est le modérateur de tout ministère de la parole » (c. 756 § 2). 


c - Les prêtres : « Il appartient en propre aux prêtres, en tant qu’ils sont les coopérateurs des évêques, d’annoncer l’Évangile de Dieu » (c. 757). 


2)     Les autres fidèles


« Les laïcs, en vertu du baptême et de la confirmation, sont par la parole et par l’exemple de leur vie chrétienne témoins du message évangélique ; ils peuvent être aussi appelés à coopérer avec l’Evêque et les prêtres dans l’exercice du ministère de la parole » (c. 759). 



B.     Principales réalisations concrètes, spécialement pour les laïcs 



1)     « Les laïcs peuvent être admis à prêcher dans une église ou un oratoire si le besoin le requiert en certaines circonstances ou si l’utilité le suggère dans des cas particuliers, selon les dispositions de la conférence des Évêques et restant sauf le c. 767 § 1 » (c. 766). 

Le c. 767 § 1 réserve l’homélie aux seuls prêtres et diacres. 


2)     La catéchèse 


a - C. 774 § 1 : « Le souci de la catéchèse, sous la direction de l’autorité ecclésiastique légitime, concerne tous les membres de l’Église, chacun pour sa part ». 


b - C. 774 § 2 : « Les parents en tout premier lieu sont tenus par l’obligation de former, par la parole et par l’exemple, leurs enfants dans la foi et la pratique de la vie chrétienne ». 


c - Le curé est tenu de veiller à la catéchèse. « A cette fin il aura recours à la collaboration des clercs attachés à la paroisse … ainsi que des laïcs, surtout des catéchistes » (c. 776). 


3)     L’œuvre missionnaire de l’Église 


a - « Comme l’Église tout entière est par sa nature missionnaire et que l’œuvre de l’évangélisation doit être considérée comme un devoir fondamental du peuple de Dieu, tous les fidèles, conscients de leur propre responsabilité, prendront leur part de l’œuvre missionnaire » (c. 781). 


b - « Les missionnaires … peuvent être choisis ou non parmi les autochtones, qu’ils soient clercs … ou qu’ils soient d’autres fidèles laïcs » (c. 784). 


c - Dans les missions, les « catéchistes » sont des « fidèles laïcs dûment instruits » (c. 785 § 1). 


4)     Les moyens de communication (cités pour mémoire, c. 822-832). 


5)     Les écoles, etc. 


§ 3. La fonction royale du Christ = La fonction de gouvernement dans l’Église 


Il n’y a pas, comme pour la fonction de sanctification et la fonction d’enseignement de l’Église, un livre spécial du code pour la fonction de gouvernement. Les canons sont dispersés à travers tout le code, car la juridiction dans l’Église n’est pas un but en soi, elle s’accomplit par et dans de multiples actions, y compris celles de sanctification et d’enseignement. 


Il y a cependant, à l’intérieur du Livre I sur les normes générales, un titre consacré au pouvoir de gouvernement (titre VIII). 


A.    Les principes 


1)     Les ministres sacrés


« Au pouvoir de gouvernement, qui dans l’Église est vraiment d’institution divine et est encore appelé pouvoir de juridiction, sont aptes, selon les dispositions du droit, ceux qui ont reçu l’ordre sacré » (c. 129 § 1). 


2)     Les fidèles laïcs 


« A l’exercice de ce pouvoir, les fidèles laïcs peuvent coopérer selon le droit » (c. 129 § 2).


Note : ce canon so

ulève la question du rapport entre le sacrement de l’ordre et la juridiction : tout pouvoir de gouvernement suppose-t-il nécessairement le sacrement de l’ordre, ou un certain pouvoir peut-il exister indépendamment de celui-ci ? Le concile n’a pas voulu trancher le débat, et le Code ne le fait donc pas non plus. Ce canon a un caractère pragmatique, dont on ne peut tirer aucune conclusion théologique. 



B.     Principales réalisations concrètes, spécialement pour les laïcs 



1)     L’admission des laïcs aux offices et charges ecclésiastiques 


« Les laïcs reconnus idoines ont capacité à être admis par les pasteurs sacrés à des offices et charges ecclésiastiques » (c. 228 § 1). 


a - Qu’est-ce qu’un office ? 


Canon 145 § 1 : « Un office ecclésiastique est toute charge constituée de façon stable par disposition divine ou ecclésiastique pour être exercée en vue d’une fin spirituelle ». 


b - Un office comportant pleine charge d’âmes ne peut être donné qu’à un prêtre. 


Canon 150 : « Un office comportant pleine charge d’âmes, dont l’accomplissement requiert l’exercice de l’ordre sacerdotal, ne peut être validement attribué à qui n’est pas encore revêtu du sacerdoce ». 


« Si, à cause de la pénurie de prêtres, l’Evêque diocésain croit devoir confier à un diacre ou à une autre personne non revêtue du caractère sacerdotal, ou encore à une communauté de personnes, une participation à l’exercice de la charge pastorale d’une paroisse, il constituera un prêtre qui, muni des pouvoirs et facultés du curé, sera le modérateur de la charge pastorale » (c. 517 § 2). 



2)     La place des laïcs dans les conseils : 


a - S’ils sont compétents, ils ont la capacité d’y aider les pasteurs comme experts et conseillers (c. 228 § 2). 


b - Ils ont leur place dans le conseil paroissial (c. 536) et le conseil économique (c. 737). 


3)     Les fidèles ont le droit et le devoir de manifester leur opinion en ce qui concerne le bien de l’Église (c. 228 § 2). 


4)     Etc., etc. 



II.                  L’AU-DELA DU CODE 


Dans la Constitution Apostolique « Sacrae Disciplinae Leges » qui promulguait le Code, le Pape Jean-Paul II déclarait : « Le Code n’entend aucunement se substituer à la foi, à la grâce et aux charismes dans la vie de l’Église ou des fidèles. Au contraire, son but est plutôt de créer dans la société ecclésiale un ordre tel que, mettant à la première place la foi, la grâce et les charismes, il rende en même temps plus facile leur épanouissement dans la vie de la société ecclésiale comme dans celle des personnes qui en font partie ». 


Les prescriptions juridiques du Code risquent à la longue, si l’on n’y prend garde, de faire oublier l’essentiel qui est la foi, la grâce et les charismes dans la vie de l’Église ou des fidèles. Il y a certes une technique juridique, il y a certes un esprit canonique, et cette technique et cet esprit sont indispensables pour une bonne lecture du Code. Cependant le droit n’est qu’un serviteur, un auxiliaire et c’est pourquoi le canoniste doit souvent, après avoir plongé la tête dans les canons du Code, redire avec le psaume 123 : « Vers toi j’ai les yeux levés, qui te tiens au ciel ; les voici comme des yeux d’esclaves vers la main de leur maître », ou plutôt, puisque nous sommes dans la Nouvelle Alliance : « les voici comme des yeux de fils vers la main de leur Père ». 


Levant les yeux vers Dieu après avoir eux aussi pris connaissance des prescriptions juridiques du Code, les laïcs, plus particulièrement, méditeront les richesses de leur vocation sacerdotale commune. Comme le dit la Constitution conciliaire Lumen Gentium : « Toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d’esprit et de corps, s’ils sont vécus dans l’Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu’elles soient patiemment supportées, tout cela devient ‘offrandes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-Christ’ ; et dans la célébration eucharistique ces offrandes rejoignent l’oblation du Corps du Seigneur pour être offertes en toute piété au Père. C’est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le monde lui-même, rendant partout à Dieu dans la sainteté de leur vie un culte d’adoration » (n° 34). 


Le grand théologien orthodoxe Paul Evdokimov, dans son livre « L’art de l’icône – Théologie de la beauté » (Desclée de Brouwer, 1972), a des accents mystiques pour célébrer la vocation de l’homme (nous pourrions peut-être plus justement dire : du fidèle laïc) : « Les dons et les charismes déterminent la vocation de l’homme : ‘cultiver’ l’immense champ du monde, inaugurer toute la gamme des arts et des sciences afin de construire l’existence humaine voulue par Dieu. Celle-ci ne peut être que fondée dans la ‘diaconia’ (service), dont le sens biblique est plus qu’un service social, ce terme signifie justement acte de guérir et restauration de l’équilibre. Elle est aussi la ‘koïnonia’ (communion) de tous les hommes… (p. 56). 


Le savant, le penseur, l’artiste, le réformateur social pourront retrouver les charismes du Sacerdoce Royal et, chacun dans son domaine, en ‘prêtre’, faire de sa recherche une œuvre sacerdotale, un ‘sacrement’ transformant toute forme de culture en lieu ‘théophanique’ : chanter le Nom de Dieu au moyen de la science, de la pensée, de l’action sociale ou de l’art… (p. 63). 


Dans l’éternelle liturgie du siècle futur, l’homme, par tous les éléments de la culture, passés au feu des purifications ultimes, chantera la gloire de son Seigneur. Mais déjà, ici-bas, l’homme d’une communauté, le savant, l’artiste, tous prêtres du Sacerdoce universel, célèbrent leur propre liturgie où la présence du Christ se manifeste à la mesure de la pureté de son réceptacle. Comme des iconographes habiles, ils tracent, avec la matière de ce monde et la lumière du Mont Thabor, une toute nouvelle réalité où transparaît lentement la figure mystérieuse du Royaume » (p. 65). 


_______________________

Jacques GRESSIER



appel00.pdf
Conception site : pierrezeiher@sfr.fr                                                                                                               Mise à jour  23 mars 2013

SACERDOCE MINISTÉRIEL ET SACERDOCE DES LAICS 


*



*                 *


Lorsqu’on parle du sacerdoce ministériel et du sacerdoce des laïcs, il importe, avant tout développement, de considérer la vocation commune baptismale des chrétiens. Les Christifideles, comme dit le code de droit canonique, les fidèles du Christ ont tous reçu le même baptême, ce baptême qui est, selon la définition qu’en donne le c. 849, « porte des sacrements, nécessaire au salut, qu’il soit reçu en fait ou du moins désiré, par lequel les êtres humains sont délivrés de leurs péchés, régénérés en enfants de Dieu, configurés au Christ par un caractère indélébile et incorporés à l’Église ». Dès lors qu’ils sont baptisés, les chrétiens ont une vocation commune, que décrit le c. 204 § 1 : « Les fidèles du Christ sont ceux qui, en tant qu’incorporés au Christ par le baptême, sont constitués en peuple de Dieu et qui, pour cette raison, faits participants à leur manière à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, sont appelés à exercer, chacun selon sa condition propre, la mission que Dieu a confiée à l’Église pour qu’elle l’accomplisse dans le monde ».


Si tous les chrétiens ont une mission commune baptismale, ils ne l’exercent cependant pas de la même manière, et c’est ici qu’il faut bien voir la distinction essentielle, que rappelle le c. 207 § 1 : « Par institution divine, il y a dans l’Église, parmi les fidèles, les ministres sacrés qui en droit sont appelés clercs, et les autres qui sont laïcs ».


(Note : Qu’il soit permis ici d’apporter encore une précision. Le c.  207 § 2 ajoute qu’ « il existe des fidèles appartenant à l’une et l’autre catégorie qui sont consacrés à Dieu à leur manière particulière » par des vœux ou « d’autres liens sacrés reconnus et approuvés par l’Église ». Il y a donc des clercs « consacrés » et d’autres qui ne le sont pas, des laïcs « consacrés » et d’autres qui ne le sont pas.)