C E D R E G I

IN PROCEDENDO ET DECERNENDO


- I. Etant donné le manque de respect de la certitude du droit, provoqué par le fait d’avoir uni deux problématiques distinctes : la question du transfert et de ses motivations, et la question de l’évaluation et de la correction de la « pratique pastorale ».


- Concernant la motivation du transfert : malgré les propos rassurants de l’Evêque, il y a une connexion étroite entre le transfert et la « pratique pastorale » dénoncée. Objectivement, la décision se présente comme une mesure disciplinaire liée à cette « pratique », comme le montrent l’insistance sur cette question et la place qu’occupe son approfondissement dans toute l’affaire. La question de la « pratique pastorale » a toujours été prioritaire dans les lettres de l’Evêque. On n’y trouve jamais la mention d’un refus ou de difficultés de l’Abbé X pour accepter une nouvelle destination, mais l’accusation directe ou indirecte concernant sa « pratique » est toujours présente. La lettre du 10 juin est emblématique : c’est le premier document clair concernant une nouvelle nomination, et c’est en même temps une lettre de reproches. S’il était vrai que la « pratique » n’avait rien à voir avec le transfert, on ne pourrait expliquer la décision du 20 juin suite aux perplexités et aux doutes exprimés par le prêtre concernant ces « accusations ».


            De plus, la motivation écrite donnée par l’Evêque ce 10 juin, selon laquelle dans la paroisse de Y, après le départ du prêtre, la pastorale aurait été menée de manière différente, est un désaveu du travail de ce dernier.


            Ce reproche introduit une grave réserve quant à la justesse de la mesure : le can. 1748 demande que l’une des conditions caractéristiques du transfert soit que le curé « utiliter regit » la paroisse d’où il est transféré. A ceci s’ajoute la simultanéité de la prise de conscience de l’existence de cette « pratique » (en janvier 2005 selon le procès-verbal de la rencontre avec les deux curés, mais la lettre du 10 novembre 2004 montre que l’Evêque est déjà au courant de l’existence de cette « pratique ») et de la première annonce informelle de transfert. Enfin, le procès-verbal commence par affirmer que les deux consulteurs ont été choisis « en raison de leur connaissance du type de ministère exercé ou à exercer par l’abbé X » : leur réunion semble donc avoir eu pour objet non pas les questions concernant le transfert, mais l’examen du ministère du requérant.


- Concernant les actes formels posés par l’Evêque : ses exigences sont équivoques. Le 10 juin, pour la première fois, il indique au requérant le nom d’une nouvelle paroisse et l’invite à en discuter. Dix jours plus tard, il signale qu’il n’est plus question de cette paroisse, et sa lettre met en évidence une procédure de révocation. Le 9 juillet, il manifeste de nouveau son intention de transférer l’Abbé X à B. Cette manière d’agit ne permet pas de comprendre quelle est la volonté de l’Evêque, ni quelles sont ses motivations de fond, alors qu’au plein milieu de l’incertitude et des rumeurs le concernant, le prêtre se déclarait encore disponible quant au principe d’un transfert.


            Ces ambiguïtés vont à l’encontre du can. 1752 qui demande, dans les transferts de curés, de sauvegarder l’équité canonique et le salut des âmes.


- II. Etant donné l’application erronée des normes canoniques concernant le transfert des curés, surtout quant aux mesures préalables de persuasion, et quant à l’évaluation des motifs conformément au can. 1750 :


- le motif générique indiqué dans la lettre du 10 juin est la mauvaise santé du curé de B. On pourrait considérer cette mention comme répondant à ce que requiert le canon 1748. Mais l’Evêque n’a fourni aucun des avis et exhortations prévues par le can. 1749, et n’a pas renouvelé les exhortations paternelles demandées par le can. 1750.


- Cette absence des mesures de persuasion n’est pas tellement étonnante, puisque le prêtre, de fait, ne s’opposait pas à une nouvelle destination, et que ses griefs concernaient d’autres accusations – peu importe qu’elles soient fondées ou non – reçues à propos de sa « pratique pastorale ».


- La décision du 20 juin de ne plus confier au requérant la paroisse de B n’a donc rien à voir avec un éventuel refus de cette nouvelle destination, mais est une mesure punitive concernant directement la « pratique pastorale ».


- L’abbé X n’a pas non plus désobéi à cette mesure du 20 juin, puisqu’il s’est contenté de demander l’application correcte de la procédure de révocation, en conformité avec ce que l’Evêque décrétait à cette date.


- le curé, réagissant à une annonce de révocation, n’a pas été invité à exposer par écrit ses motifs pour ne pas « déférer à l’avis et aux exhortations » d’un transfert précis, et n’a pas eu l’occasion de le faire avant la discussion entre l’Evêque et les deux curés consulteurs du 3 juillet 2005.


- La lettre du requérant du 10 avril et l’échange de correspondance antérieur ne pouvaient servir de base de discussion, puisque le prêtre n’y exposait que des observations génériques concernant la première proposition d’un transfert hypothétique. Cette réunion ne répond donc pas à la norme du can. 1750.


- Le curé n’a eu le loisir de faire un tel exposé que lorsque, le 9 juillet, il a de nouveau été invité à un transfert. Il a exercé ce droit le 16 juillet, en donnant son accord de principe, tout en demandant à discuter les modalités. Ce droit élémentaire lui avait d’ailleurs été reconnu dans la lettre du 10 juin.


- Non seulement cette discussion des modalités a été finalement refusée à quelqu’un qui obéissait, mais cette lettre du 16 juillet n’a même pas eu le sort d’une lettre motivée de refus selon le can. 1749, et comme toute réponse n’a obtenu qu’une injonction à obtempérer dans les 48 heures.


- Etant donné que le décret de transfert du 25 juillet ne contient pas de motivations (cf. c.  51).


- Etant donné que Son Excellence Mgr l’Evêque, invité à envoyer toute la documentation sur l’affaire, n’a pas de nouveaux éléments à fournir au dossier.


- Etant donné que « dans sa paroisse chaque curé doit jouir, en son office, de la stabilité que requiert le bien des âmes » (Concile Œcuménique Vatican II, CD 31) et que l’obéissance promise à son Ordinaire est à comprendre selon les canons.


- Etant donné que « dans sa paroisse chaque curé doit jouir, en son office, de la stabilité que requiert le bien des âmes » (Concile Œcuménique Vatican II, CD 31) et que l’obéissance promise à son Ordinaire est à comprendre selon les canons.


- Etant donné que le dépassement des délais ne libère pas l’autorité compétente de l’obligation d’émettre le décret requis (c. 57, § 3).


CETTE CONGRÉGATION DÉCLARE LA NULLITÉ

du Décret de transfert du 25 juillet 2005

Fait au Siège de la Congrégation pour le Clergé, le 20 juillet 2006

Dario Cardinal Castrillon Hoyos


II. COMMENTAIRE DU DÉCRET


EN DROIT


            La cinquième partie du Livre VII sur « les procès » du Code de Droit canonique contient deux sections. La première est consacrée au recours contre les décrets administratifs (c. 1732-1739), la seconde à la procédure de révocation ou de transfert des curés (c. 1740-1752). Cette seconde question est elle-même divisée en deux chapitres, le premier concernant la procédure de révocation des curés (c. 1740-1747) et le second la procédure du transfert des curés (c. 1748-1752).


            En plus des c. 1740-1747 sur la procédure de révocation des curés, le Code, dans le Livre VI sur « les sanctions dans l’Eglise » prescrit que l’excommunication empêche de « remplir des offices ecclésiastiques, des ministères ou n’importe quelle charge, ou de poser des actes de gouvernement » (c. 1331, § 1, 3°), que la suspense défend « tous les actes du pouvoir de gouvernement, ou certains d’entre eux ; ou l’exercice de tous les droits ou pouvoirs inhérents à un office, ou celui de certains d’entre eux » (c. 1333 § 1, 2° et 3°) et que des peines expiatoires peuvent entraîner la privation d’une charge ou le transfert pénal à un autre office (c. 1336, § 1, 2° et 4°), de même qu’en vertu du c. 194 § 1 est « révoqué de plein droit de tout office ecclésiastique 1° celui qui a perdu l’état clérical, […] 3° le clerc qui a attenté un mariage même civil », mais il n’est pas question de sanction d’une conduite coupable dans la procédure de révocation des curés exposée par les c. 1740-1747, qui se situe à un autre niveau.


            En plus des c. 1740-1747 sur la procédure de révocation des curés, le Code, dans le Livre VI sur « les sanctions dans l’Eglise » prescrit que l’excommunication empêche de « remplir des offices ecclésiastiques, des ministères ou n’importe quelle charge, ou de poser des actes de gouvernement » (c. 1331, § 1, 3°), que la suspense défend « tous les actes du pouvoir de gouvernement, ou certains d’entre eux ; ou l’exercice de tous les droits ou pouvoirs inhérents à un office, ou celui de certains d’entre eux » (c. 1333 § 1, 2° et 3°) et que des peines expiatoires peuvent entraîner la privation d’une charge ou le transfert pénal à un autre office (c. 1336, § 1, 2° et 4°), de même qu’en vertu du c. 194 § 1 est « révoqué de plein droit de tout office ecclésiastique 1° celui qui a perdu l’état clérical, […] 3° le clerc qui a attenté un mariage même civil », mais il n’est pas question de sanction d’une conduite coupable dans la procédure de révocation des curés exposée par les c. 1740-1747, qui se situe à un autre niveau.


            Les deux procédures, celle de la révocation d’un curé et celle du transfert d’un curé, ayant un esprit commun et des règles analogues, il est préférable de les comparer à chaque étape de leur déroulement. Tout d’abord, quels sont les motifs de la révocation d’un curé et ceux du transfert d’un curé (A) ? En second lieu, quels sont les points communs et les différences des deux procédures (B) ?


Note : le présent commentaire n’examinera pas le cas des curés membres d’un institut religieux ou d’une société de vie apostolique.


A. Les motifs de la révocation et du transfert d’un curé


            1. La révocation


C. 1740 : « Quand pour une raison quelconque et même sans faute grave de l’intéressé, le ministère d’un curé devient NOXIUM ou au moins inefficace, le curé peut être révoqué de sa paroisse par l’évêque diocésain ».


            La traduction française officielle du Code parle de ministère devenu « nuisible ». Le terme est mal choisi. Noxius signifie certes nuisible, mais aussi pernicieux, malfaisant, dangereux, préjudiciable, causant du tort, dommageable, coupable. Parmi tous ces adjectifs synonymes, le moins offensant pour le curé qui exerce le ministère controversé semble être « préjudiciable », car ce qui compte avant tout, c’est l’efficacité objective du ministère paroissial et le bien des âmes, et il est possible qu’un curé, sans faute subjective de sa part (sauf le cas prévu au c. 1741, 4°, dont il va être question), cause un certain préjudice aux personnes dont il a la charge pastorale.


            Ce préjudice peut se produire pour les raisons suivantes, énumérées de façon non exhaustive par le c. 1741 :


« 1° : une manière d’agir qui cause un grave détriment ou un trouble grave dans la communion ecclésiale ;


2° : l’incompétence ou une infirmité permanente de l’esprit ou du corps qui font que le curé n’est plus en état de s’acquitter efficacement de ses fonctions ;


3° : la perte de la bonne estime chez les paroissiens probes et sérieux ou l’aversion envers le curé, dont on prévoit qu’elle ne cessera pas rapidement ;


4° : une grave négligence ou la violation de ses devoirs de curé persistant après une monition ;


5° : une mauvaise administration des biens temporels entraînant un grave dommage pour l’Eglise, chaque fois qu’un autre remède ne peut être apporté à ce mal. »


            2. Le transfert


            Dans le cas du transfert, non seulement le ministère du curé n’est pas préjudiciable aux paroissiens, mais le prêtre est un « bon curé », apprécié, efficace. Toutefois le bien des âmes est encore en jeu, avec celui de l’Eglise. En effet, aux termes du c. 1748, « Si le bien des âmes, les nécessités ou l’utilité pour l’Eglise réclament qu’un curé soit transféré de sa paroisse qu’il dirige avec fruit à une autre paroisse ou à un autre office, l’Evêque lui proposera par écrit ce transfert et l’invitera à l’accepter pour l’amour de Dieu et des âmes ».


            Dans le cas de la révocation le curé ne dirige pas – ou ne dirige plus – avec fruit sa paroisse : il doit la quitter pour le bien de cette paroisse. Dans le cas du transfert, le curé exerce un excellent ministère, mais l’Eglise a besoin de lui ailleurs et lui demande d’accepter son changement pour l’amour de Dieu et des âmes.


            Dans l’un et l’autre cas, le Code prescrit à l’Evêque diocésain une procédure avant qu’il ne prenne sa décision définitive.


B. La procédure dans la révocation et dans le transfert


            Une règle essentielle dans les deux cas - révocation ou transfert - est le dialogue, la concertation, entre le curé et son Evêque.


            1. La première démarche, venant de l’Evêque


a. Dans l’hypothèse de la révocation, il est d’abord évident que l’Evêque doit avoir la preuve qu’il existe un des motifs du c. 1741. Le texte latin porte : « si ex instructione peracta constiterit adesse causam de qua in c. 1740 », ce qui signifie non pas seulement : « si, à la suite d’une enquête, il est établi qu’il existe un motif dont il s’agit au c. 1740 [motif précisé parmi ceux du c. 1741] », mais « il est prouvé », c’est-à-dire « démontré », « résultant d’un raisonnement convaincant », qu’il existe un motif des c. 1740 et 1741. De simples rumeurs ne suffisent pas et il serait donc normal, même si cela n’est pas prévu par le c. 1742 § 1, que le curé victime de rumeurs ou d’accusations se voie reconnaître le droit à la défense, avec tout ce que ce droit comporte.


            Une fois le motif prouvé, l’Evêque en débat « avec deux curés choisis à cet effet de manière stable par le conseil presbytéral sur proposition de l’Evêque » (c. 1742 § 1). Le même canon poursuit : « s’il estime en conséquence en venir à la révocation du curé », l’Evêque doit « lui indiquer, pour que la mesure soit valide, les raisons et les arguments ». Le droit de la défense est ici en partie respecté, bien que le c. 1742 § 1 se termine, non par la possibilité reconnue au curé de répondre et de faire valoir ses propres arguments, mais par la recommandation faite à l’Evêque d’« exhorter paternellement le curé à présenter sa renonciation dans les quinze jours ».


b. Dans l’hypothèse du transfert, l’Evêque « proposera par écrit (au curé) ce transfert et l’invitera à l’accepter pour l’amour de Dieu et des âmes » (c. 1748).


            2. La première réaction possible du curé


a. Dans le cas de la révocation


            On a déjà dit que la simple justice, manifestée ici par le droit de la défense, voudrait que le curé au ministère décrié soit averti des critiques qu’on lui adresse et puisse y répondre.


            Cette étape étant supposée, l’Evêque ayant ensuite débattu du problème avec les deux prêtres prévus au c. 1742 § 1 et ayant « exhorté paternellement le curé à présenter sa renonciation dans les quinze jours » (c. 1742 § 1), le prêtre peut « présenter sa renonciation purement et simplement » (c. 1743), « mais il peut aussi la donner sous condition, pourvu que cette condition puisse être acceptée légitimement par l’Evêque et soit admise effectivement par lui » (c. 1743).


b. Dans le cas du transfert


            Le curé peut évidemment accepter son transfert « purement et simplement » (selon l’expression du c. 1743 pour le curé révoqué), mais, s’il estime avoir de bonnes raisons pour son maintien dans la paroisse « qu’il dirige avec fruit », il peut les faire valoir. Le c. 1749 prescrit en effet : « Si le curé n’entend pas déférer à l’avis et aux exhortations de l’Evêque, il donnera ses motifs par écrit » (c. 1749).


            3. L’attitude de l’Evêque devant les réticences du curé


a. Dans le cas de la révocation


            Si le curé révoqué ne répond pas dans le délai prévu, l’Evêque doit renouveler son invitation et donner un nouveau délai pour la réponse (c. 1744 § 1). Si le curé ne répond toujours pas, alors que rien ne l’en empêche, ou s’il « refuse de présenter sa renonciation sans donner aucun motif », l’Evêque peut agir et porter le décret de renonciation (c. 1744 § 2).


            Toutefois, si le curé répond et « conteste la raison alléguée et les arguments avancés » pour sa révocation, et s’il fait « état d’éléments qui paraissent insuffisants à l’Evêque », celui-ci lui demandera d’examiner les « actes », c’est-à-dire l’ensemble des documents ayant permis à l’Evêque de conclure à la nécessité de la révocation (cf. c. 1742 § 1), et de répondre par écrit en exposant ses propres arguments et les « preuves en sens contraire » qu’il pourrait avoir (c. 1745, 1°).


            Cela étant acquis, l’Evêque, « après avoir complété si nécessaire son enquête, examinera la situation avec l’aide des mêmes curés dont il s’agit au c. 1742 § 1 » [ceux-ci étant remplacés en cas d’empêchement] (c. 1745, 2°), et il prendra une décision définitive : « Il décidera enfin si le curé doit être révoqué ou non, et portera sans délai un décret à ce sujet » (c. 1745, 3°).


b. Dans le cas du transfert


            Après avoir reçu les remarques écrites du curé réticent devant le transfert qui lui est proposé, « si, en dépit des raisons alléguées, l’Evêque estime qu’il ne doit pas revenir sur sa décision, il appréciera avec les deux curés choisis selon le c. 1472 § 1, les raisons favorables ou défavorables au transfert. S’il estime après cela que le transfert doit avoir lieu, il renouvellera au curé ses exhortations paternelles » (c. 1750).


            « C. 1751 § 1 : Cela fait, si le curé refuse encore et si l’Evêque estime que le transfert doit avoir lieu, ce dernier portera le décret de transfert en disposant que la paroisse sera vacante à l’expiration d’un délai fixé » (et non « du » délai fixé : elapso praefinito tempore).


            Bref, tant pour la révocation que pour le transfert, le code de droit canonique impose une concertation et un dialogue – par écrit – entre le curé et l’Evêque. Il impose aussi à l’Evêque d’examiner le problème avec deux prêtres, donc de consulter des tiers à l’affaire avant de conclure celle-ci. Enfin, à l’Evêque qui, dans son diocèse, est ministre de gouvernement (c. 375 § 1), qui a la charge de le gouverner (c. 375 § 2), à qui « revient dans le diocèse qui lui est confié, tout le pouvoir ordinaire, propre et immédiat requis pour l’exercice de sa charge pastorale » (c. 381 § 1), le Code reconnaît naturellement son droit et son devoir : c’est l’Evêque qui, en fin de compte, décide, et il décide soit la révocation (c. 1745, 3°), soit le transfert (c. 1751 § 1), soit le maintien en l’état.


            4. Après le décret épiscopal de révocation ou de transfert


a. Dans le cas de la révocation


            L’Evêque « s’occupera d’assigner (au curé révoqué) un autre office s’il en est capable, ou de lui assurer une pension, selon le cas et si les moyens le permettent » (c. 1746). Le curé révoqué doit quitter le plus rapidement possible son presbytère (c. 1747 § 1, le § 2 tempérant cette obligation en cas de maladie).


            Il reste aussi au curé révoqué la possibilité et le droit de faire un recours hiérarchique contre la décision de son Evêque (c. 1747 § 3, cf. c. 1732-1738). Ce recours est suspensif, puisque l’Evêque ne peut pas nommer un nouveau curé, mais seulement un administrateur, tant que le recours est pendant (c. 1743 § 3). (Cette question du recours est importante, mais elle ne peut pas être examinée ici, elle fera l’objet d’une étude spéciale.)


b. Dans le cas du transfert


            Une fois expiré le délai fixé par l’Evêque pour la vacance de la paroisse, l’Evêque déclarera cette vacance.


            Comme pour le décret de révocation, le décret de transfert peut être l’objet d’un recours hiérarchique (c. 1732-1738). Ce recours est lui aussi suspensif.


            Enfin, comment ne pas conclure ces remarques par l’admirable c. 1742 – le dernier canon du Code - : « Dans les causes de transfert, les dispositions du c. 1747 seront appliquées, en observant l’équité canonique et sans perdre de vue le salut des âmes qui doit toujours être dans l’Eglise la loi suprême ».


*


*            *


EN  FAIT



            Dans sa partie « In procedendo et decernendo » le décret de la Congrégation pour le Clergé relève deux défauts dans la décision de transfert prise par l’Evêque de Z, le 30 juillet 2005 : d’une part « le manque de respect de la certitude du droit » et d’autre part « l’application erronée des normes canoniques concernant le transfert des curés ». Le texte du décret doit être lu dans son intégralité et les remarques qui suivent ne sont qu’un simple schéma pour cette lecture.


A. Le manque de respect de la certitude du droit


            Ce manque de respect a été provoqué « par le fait d’avoir uni deux problématiques distinctes : la question du transfert et de ses motivations, et la question de l’évaluation et de la correction de la ‘pratique pastorale’.


            En ce qui concerne la motivation du transfert, l’Evêque a décidé celui-ci comme une sanction du curé en raison de sa ‘pratique pastorale’. Il connaissait depuis le mois de novembre 2004 l’existence de cette ‘pratique’, il a choisi les deux consulteurs « en raison de leur connaissance du type de ministère exercé par l’abbé X », et donc il les a choisis pour discuter non pas du transfert d’un prêtre estimé mais du ministère contesté de l’abbé X.


            De plus, d’abord l’Evêque indique à l’abbé X qu’il s’agit d’un transfert, puis il parle d’une révocation, de nouveau d’un transfert… Que voulait donc l’Evêque, alors que l’abbé X se déclarait ouvert à la perspective d’un transfert ?


B. L’application erronée des normes canoniques concernant le transfert des curés


            Il est nécessaire de lire entièrement et attentivement ce qu’a écrit à ce sujet la Congrégation pour le Clergé : en faire un résumé serait dénaturer le texte.


            En terminant ce commentaire, on se permettra de s’étonner de la série d’erreurs canoniques commises par l’Evêque de Z, et l’on notera avec reconnaissance le rappel libérateur de la Congrégation, à la fin de son décret : « L’obéissance promise à son Ordinaire est à comprendre selon les canons ».



Jacques Gressier

4 octobre 2006

appel00.pdf

LA  RÉVOCATION  OU  LE  TRANSFERT  DES  CURÉS


Texte et commentaire

d’un décret de la Congrégation pour le Clergé


I. LE DÉCRET DE LA CONGRÉGATION POUR LE CLERGÉ


Note : Pour des raisons évidentes de discrétion, les noms des personnes et des lieux ont été supprimés et les dates modifiées. De même la « pratique pastorale » incriminée n’est pas indiquée.


DÉCRET


            L’abbé X, curé à temps indéterminé de la paroisse de Y, dans le diocèse de Z, a été invité par son Evêque, le 15 octobre 2004, à se préparer à un transfert pour l’été suivant.


            Dans le même temps, comme le montre sa lettre du 10 novembre 2004, l’Evêque se préoccupe légitimement d’une « pratique pastorale » de l’abbé X, et il demande à celui-ci de la suspendre début février. Après quelque hésitation, une rencontre, des échanges de lettres, l’abbé X s’engage à obéir le 10 avril 2005. Dans le même temps, les rumeurs le concernant se propagent, il s’estime objet de suspicion et de calomnie. Il obtient laborieusement un entretien le 14 mai, pour exposer ses difficultés, et le 28 mai il se plaint de nouveau des bruits le concernant, demandant à être confronté avec ses accusateurs.

            En réponse l’Evêque lui écrit le 10 juin, d’une part en demandant formellement d’accepter un transfert à la paroisse de B, et d’autre part en développant longuement les considérations doctrinales concernant la « pratique pastorale » incriminée. L’abbé X réagit vivement à l’une des mises en garde, concernant le risque de manipulation des âmes, parce qu’elle lui semble reprendre les calomnies qui le blessent. Le 20 juin, son Evêque répond en lui annonçant sa révocation. Le 26 juin, l’orateur demande que lui soit appliquée la procédure canonique. Le 3 juillet, les curés consulteurs étaient réunis pour discuter « des raisons avancées pour refuser, différer ou conditionner … l’acceptation de cette nomination » qui auraient été fournies par le curé à compter de l’annonce informelle de nomination du 15 octobre précédent. Le 9 juillet, l’Evêque annonçait au curé la fin d’une procédure de transfert, se réclamant du c. 1750, et demandant une réponse sous huitaine. Le 16 juillet, l’orateur « donnait ses motifs par écrit », acceptant le principe du transfert mais n’entendant pas déférer dans l’immédiat à l’avis de l’évêque. Le 30 juillet Mgr N portait un décret définitif de transfert, « au nom de l’obéissance et en vertu de mon autorité de juridiction ». L’abbé X a interposé une pétition de reconsidération de ce décret le 31 juillet, par l’intermédiaire de son avocat. En l’absence du nouveau décret, le 1° septembre il interposait un recours hiérarchique auprès de cette Congrégation.


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