C E D R E G I


Qu’est-ce qu’une paroisse ?


C. 515 § 1 : « La paroisse est la communauté précise de fidèles qui est constituée d’une manière stable dans l’Église particulière, et dont la charge pastorale est confiée au curé, comme à son pasteur propre, sous l’autorité de l’Évêque diocésain. »


Qu’est-ce qu’un curé ?


C. 519 : « Le curé est le pasteur propre de la paroisse qui lui est remise, en exerçant sous l’autorité de l’Évêque diocésain dont il a été appelé à partager le ministère du Christ, la charge pastorale de la communauté qui lui est confiée, afin d’accomplir pour cette communauté les fonctions d’enseigner, de sanctifier et de gouverner, avec la collaboration éventuelle d’autres prêtres ou de diacres, et avec l’aide apportée par des laïcs, selon le droit. »


Qu’est-ce qu’un doyen ?


C. 535 § 1 : « Le vicaire forain, appelé aussi doyen, archiprêtre ou autrement, est le prêtre mis à la tête d’un vicariat forain », c’est-à-dire d’un doyenné, d’un archiprêtré ou de tout autre groupement territorial.


I.  LE CURE



La loi générale qui régit la mission du curé est donnée par le Code de Droit Canonique. Un certain nombre de diocèses ont ajouté ou ajoutent des normes particulières, contenues dans des directives diocésaines ou des lettres de mission.


A. La loi générale : le Code de Droit canonique


Le rôle et la mission du curé sont indiqués par les canons 528 § 1 et 2, 529 § 1 et 2, 530, 534 § 1, 2, 3. Ces canons ne pouvant pas être ici cités intégralement, il suffira d’en montrer les grands axes.


C. 528 § 1




C. 528 § 2




C. 529 § 1



C. 529 § 2 : « Le curé reconnaîtra et soutiendra la part propre que les laïcs ont dans la mission de l’Église, en favorisant leurs associations à des fins religieuses. Il coopérera avec son propre Évêque et le presbyterium du diocèse, en travaillant à ce que les laïcs aient le souci de la communion dans la paroisse et qu’ils se sentent membres tant du diocèse que de l’Église tout entière, et qu’ils participent aux œuvres qui ont pour but de promouvoir cette communion et les soutiennent. »


C. 530 – Fonctions spécialement confiées au prêtre : baptême, assistance au mariage, célébration des funérailles, etc.…


C. 530 – Fonctions spécialement confiées au prêtre : baptême, assistance au mariage, célébration des funérailles, etc.…


C. 534 § 1, 2 et 3 : Chaque dimanche et fête d’obligation, le curé doit célébrer la messe pour le peuple qui lui est confié.



En un langage assez facile à comprendre le Code expose ainsi l’essentiel du ministère du curé. Il est évident qu’une loi ne peut pas détailler les multiples activités sacerdotales qui se présentent dans la vie d’un curé de paroisse, mais d’une part ce prêtre sait déjà par lui-même, grâce à son éducation chrétienne, à sa formation au séminaire et à son esprit de service de Dieu et de l’Église, ce qu’il a à faire dans sa paroisse, et d’autre part il peut être guidé et aidé dans son ministère par ses confrères et par les fidèles de sa paroisse. Les directives diocésaines peuvent préciser certains objectifs pastoraux à viser par les curés, mais elles n’ont pas à étouffer leur action apostolique par des réglementations superflues et parfois obscures, et encore moins par des « lettres de mission ».



B. Le droit particulier dans le diocèse


L’Évêque diocésain peut promulguer ce qu’on appelle des « décrets généraux », c’est-à-dire des règles communes pour « une communauté capable de recevoir la loi » (c. 29), son diocèse étant évidemment une communauté de ce type. Ces décrets généraux sont de véritables lois.


L’Évêque diocésain, ou, selon certaines modalités, les vicaires généraux et épiscopaux peuvent aussi émettre des « décrets particuliers », c’est-à-dire des décisions concernant une personne ou un groupe particulier de personnes, comme, par exemple, à propos d’une nomination, d’une union de paroisses ou d’une réglementation éventuelle (c. 48).


La « lettre de mission » est un décret particulier, qui depuis quelque temps est souvent adressé aux prêtres lors de leur nomination à un poste, ou à des laïcs à qui est confiée une certaine responsabilité à l’intérieur de la paroisse ou du diocèse.


Puisque pour le moment il est question du curé au sens propre du terme (c. 519), que peut-on penser de la lettre de mission qu’il reçoit parfois lors de sa nomination à ce poste ?


Lorsqu’un prêtre est nommé curé, il reçoit un « office ecclésiastique », c’est-à-dire une « charge constituée de façon stable par disposition […] ecclésiastique pour être exercée en vue d’une fin spirituelle » (c. 145 § 1).


Le § 2 de ce canon 145 est important : « Les obligations et les droits propres à chaque office ecclésiastique sont déterminés par le droit qui le constitue ou par le décret de l’autorité compétente qui, tout ensemble, le constitue et le confère ». Le premier cas : « déterminés par le droit qui le constitue » s’applique à la charge du curé, que « constitue », c’est-à-dire construit et établit, le droit général de l’Église. Le second cas : « décret de l’autorité… » regarde par exemple la charge de responsable de secteur, qui sera étudiée pour elle-même. (Dès à présent on peut dire qu’en raison des imprécisions et du flou des dispositions ecclésiastiques qui la constituent, ainsi qu’à cause de son instabilité congénitale, cette charge n’est pas un office.)


Un décret particulier, comme l’est la lettre de mission, est un acte administratif et le c. 38 indique qu’ « un acte administratif […] ne produit pas d’effet s’il […] est contraire à la loi […], à moins que l’autorité compétente n’ait expressément ajouté une clause dérogatoire. » Or l’autorité compétente qui a promulgué le Code de droit canonique n’a ajouté aucune clause dérogatoire aux règles régissant la charge et les devoirs du curé. Une lettre de mission qui restreint ce rôle ou qui réglemente la liberté d’action et d’initiative du curé, est nulle et non avenue. Certes le curé – le c. 519 l’a déjà dit avant la lettre de mission – exerce sa charge pastorale sous l’autorité de l’Évêque diocésain, mais il n’est pas un fonctionnaire aux ordres d’un supérieur qui serait le doyen ou le vicaire épiscopal, il est le pasteur propre de la paroisse qui lui est confiée par son Évêque et à ce titre le principe de subsidiarité doit être respecté absolument à son égard.


Ce principe fera l’objet d’une étude particulière. En attendant on lira ce court passage du Pape Jean-Paul II dans son encyclique « Centesimus Annus » à propos du rôle de l’État dans le secteur économique : « Il convient de respecter le principe de subsidiarité : une société d’ordre supérieur ne doit pas intervenir dans la vie interne d’une société d’un ordre inférieur, en lui enlevant ses compétences, mais elle doit plutôt la soutenir en cas de nécessité et l’aider à coordonner son action avec celle des autres éléments qui composent la société, en vue du bien commun » (n° 42).


C’est exactement ce que la loi générale de l’Église demande au doyen de réaliser vis-à-vis des curés de son doyenné.


II.   LE DOYEN


A. La loi générale : le Code de Droit canonique


C. 555 § 1 : « Outre les facultés qui lui sont légitimement accordées par le droit particulier, les obligations et les droits du vicaire forain [= doyen] sont :



B. Le droit diocésain


Un exemple : le diocèse de … (1988)

Note préliminaire. Dans ce diocèse :




« Sa nomination


Il est nommé par l’Évêque en son conseil après consultation sous la responsabilité de l’archidiacre. Il est nommé pour six ans renouvelables.

Il est aidé dans sa tâche de doyen par une équipe qui assurera le suivi des décisions prises en Conseil Pastoral de Zone, et répondra aux urgences. Dans cette équipe, il a un adjoint chargé des affaires économiques.

En lien avec lui, un ou plusieurs prêtres sont chargés des relations avec leurs confrères.

L’archidiacre cherche, avec lui, les décisions à prendre pour le décharger d’une partie de ses autres charges pastorales.


Sa charge


Il a la charge de la zone. Il prend avec le Conseil de Zone, les décisions (objectifs et moyens de leur mise en œuvre) nécessaires à l’animation pastorale de la zone. Il en assure le suivi.


Responsable de la mission, il est autant attentif à la pastorale des mouvements, services et aumôneries, qu’à la pastorale territoriale. Il travaille volontiers avec des laïcs en responsabilité.


Responsable de la coordination, il veille à ce que les différents ministères et responsabilités d’Église puissent s’exercer dans le respect les uns des autres. Il travaille régulièrement avec les responsables pastoraux de secteur.


Responsable de l’administration, il préside le Conseil Économique de Zone animé par le DZAT (délégué de zone aux affaires temporelles).


Responsable du lien avec l’ensemble du diocèse, il travaille régulièrement avec l’archidiacre. Il gère le contentieux avec lui. Il participe aux réunions de doyens. »


Quelques remarques sont à faire. Tout d’abord, dans ce diocèse, le doyen est « responsable de la mission », « responsable de la coordination », « responsable de l’administration » (des biens matériels) et « responsable du lien avec l’ensemble du diocèse ». Comment concilier toutefois la coordination puisque dans certaines paroisses confiées à un curé existe un conseil pastoral (qui n’a cependant que voix consultative – c. 536 § 2), que dans le secteur existe aussi un conseil pastoral, sans « règles impératives de fonctionnement », mais qui prend des décisions, que la zone possède également un conseil pastoral qui « précise les objectifs pastoraux pour la zone et les moyens pour leur mise en œuvre, ceux-ci (étant) définis dans le cadre des orientations et objectifs diocésains », et qui prend, « sous la responsabilité du doyen, les décisions nécessaires à la mise en œuvre de la mission et à l’animation pastorale » (1988) ?


Si l’on ajoute que l’équipe pastorale d’un secteur – dont font partie les prêtres du secteur ainsi que les personnes affectées par une lettre de mission au service du secteur – est « l’équipe opérationnelle du secteur », qui est « responsable de la mise en œuvre des objectifs décidés à la zone » (1988), on se demande comment de ce maquis d’instances intermédiaires pourra se dégager une ligne de conduite claire, d’autant que le doyen doit en plus veiller « à ce que les différents ministères et responsabilités d’Eglise puissent s’exercer dans le respect les uns des autres », ce qui signifie qu’il doit veiller également à ce que puisse s’exercer aussi dans le respect les uns des autres le ministère des prêtres qui ont reçu ensemble et solidairement la charge de plusieurs paroisses.


Note : D’autres diocèses ont sans doute procédé autrement que le diocèse ci-dessus cité. Cedregi se permet de demander qu’on veuille bien dans ce cas lui communiquer, pour qu’il les diffuse, leurs expériences et leurs directives épiscopales, toute discrétion sur l’origine de ces textes étant garantie.


III.  LES PRETRES AYANT REÇU ENSEMBLE ET SOLIDAIREMENT LA CHARGE DE PLUSIEURS PAROISSES


Ces prêtres n’étant pas curés (cf. site Cedregi : Le modérateur de la charge paroissiale), il est préférable de les appeler « prêtres in solidum ».


A. La loi générale du Code au sujet des prêtres in solidum


C. 517 § 1 : L’un de ces prêtres est le « modérateur de la charge pastorale, c’est-à-dire qu’il dirigera l’activité commune et en répondra devant l’Évêque. »


C. 543 § 1 : Chacun de ces prêtres, « selon le règlement qu’ils auront eux-mêmes établi, est tenu par l’obligation d’accomplir les actes et fonctions du curé … sous la direction du modérateur. »


B. Le droit particulier dans le diocèse


Ce droit particulier s’exprime surtout par les lettres de mission.


Un exemple : le diocèse de … (1995)

« Thierry est nommé au secteur de …, en résidence à … A ce titre il participe à l’équipe pastorale de secteur.


Un exemple : le diocèse de … (1995)

« Thierry est nommé au secteur de …, en résidence à … A ce titre il participe à l’équipe pastorale de secteur.


A.B., C.D., E.F., Thierry reçoivent solidairement la charge de l’ensemble paroissial de …, les paroisses associées de …, et les paroisses de …


A.B. anime l’E.P.S. (équipe pastorale de secteur), est modérateur de l’équipe in solidum et accompagne les E.L.A. (équipes locales d’animation) de R. ;


C.D. accompagne l’E.L.A. de S. […] ; E.F. accompagne l’E.L.A. de T. […] ; Thierry accompagne l’E.L.A. de U., mais est d’abord nommé pour la pastorale des jeunes […]


[…] Cette mission sera revue à la fin de l’année apostolique 1995-1996. »


Cette lettre est en opposition avec le droit général de l’Eglise et semble ignorer certaines règles du droit diocésain.


En ce qui concerne ce dernier, un texte officiel du diocèse en question avait déjà déclaré que les prêtres nommés dans un secteur faisaient partie de l’équipe pastorale de secteur. Pourquoi le redire dans le cas de Thierry ?


Par ailleurs, selon le droit général, Thierry, nommé prêtre in solidum, est chargé avec ses confrères d’un ensemble de paroisses (on notera au passage, même si ces appellations recouvrent des réalités transitoires, la complexité canonique – et donc pastorale – de la juxtaposition dans un même ensemble in solidum d’un « ensemble paroissial », de « paroisses associées » et de « paroisses »). Or dans cet ensemble de paroisses, le droit général de l’Église confie aux prêtres in solidum la tâche d’établir eux-mêmes le règlement de leurs activités, sous la direction du modérateur. En d’autres termes, comme l’écrivait un prêtre, « c’est à l’équipe qui a la charge pastorale d’une ou plusieurs paroisses qu’il revient de décider qui fera quoi. » En méconnaissant le rôle, le devoir et le droit de cette équipe in solidum, l’auteur de la lettre de mission a commis un abus de pouvoir.


Par ailleurs, en annonçant que la lettre de mission sera revue dans quelques mois, son auteur ignore que la charge pastorale d’une ou de plusieurs paroisses confiée solidairement à plusieurs prêtres est un « office », c’est-à-dire « une charge constituée de façon stable (c. 145 § 1). Étant saufs le droit et le devoir de l’autorité diocésaine compétente de veiller au bon fonctionnement de l’équipe in solidum, la stabilité de la charge pastorale confiée à cette équipe doit être respectée. Là encore les prêtres in solidum ne sont pas des fonctionnaires aux ordres d’un supérieur qui serait le doyen ou le vicaire épiscopal, mais les titulaires d’un office, avec ses droits et ses devoirs « en vue d’une fin spirituelle » (c. 145 § 1).


Les lettres de mission sont l’œuvre de vicaires épiscopaux. Toutefois le doyen, on l’a vu, est, dans le diocèse en question, « responsable de la mission », « responsable de la coordination » et responsable encore « du lien avec l’ensemble du diocèse ». Si c’est le vicaire épiscopal, par la lettre de mission, qui définit, et modifie lors des « révisions » de la lettre, l’action pastorale des prêtres in solidum, comment ce rôle du vicaire épiscopal va-t-il se concilier avec celui du doyen ? Tous les commentateurs du Code soulignent les difficultés nées de la complexité des structures diocésaines. Ainsi, par exemple, le commentaire des Universités de Navarre et St Paul d’Ottawa : « Le contexte de cet office [celui de vicaire forain = doyen] réclame une législation particulière adéquate permettant d’harmoniser les relations directes des curés avec l’évêque, avec les vicaires épiscopaux et les vicaires forains » (p. 430). Ou encore, à propos du vicaire général, qui a aussi son rôle à jouer dans le diocèse, le même commentaire demande, à propos des normes du c. 479 sur ses fonctions et celles des vicaires épiscopaux : « La rédaction du canon manque de clarté et permet de soutenir des points de vue différents. C’est précisément pour cela qu’il est tout à fait nécessaire que, pour assurer la coordination, les compétences des différents vicaires [général et épiscopaux] soient délimitées avec précision par le droit particulier, ne serait-ce que par les lettres de nomination » (p. 374).


Ces discussions canoniques ne sont pas vaines. D’une part en effet elles sont l’occasion de contribuer à dissiper un réel malaise chez de nombreux prêtres en ministère paroissial et d’autre part elles montrent que la bonne volonté ne suffit pas pour exercer le pouvoir de gouvernement dans l’Église, tant il est vrai que l’ignorance théorique et pratique des lois générales de l’Église ainsi que les erreurs et les défauts des droits particuliers vont à l’encontre du but recherché, qui est le salut des âmes (cf. c. 1752).


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LE CURE ET LE DOYEN


La réorganisation actuelle des paroisses dans l’Église de France – la seule Église qui puisse être envisagée ici – pose de nombreux problèmes, que la complexité des structures mises en place dans les diocèses aggrave souvent au détriment du but recherché. Il est donc indispensable, dans ce domaine si mouvant, de se référer d’abord aux notions établies par le droit général de l’Église, avant d’évaluer les directives, orientations et ordonnances du droit particulier des divers diocèses.


La présente étude est consacrée aux rôles respectifs du curé et du doyen, ainsi qu’à leurs relations mutuelles. Inévitablement devront en même temps être abordés, en raison de la multiplication des groupes de paroisses confiées à plusieurs prêtres à la fois et solidairement, les rapports entre ces prêtres – qui ne sont pas « curés » - et leur doyen.


Une remarque très importante est à faire immédiatement. Tous les commentaires du Code de 1983 – dont ceux de l’Université de Salamanque (Cerf-Tardy) et ceux des Universités de Navarre et St Paul d’Ottawa, (Wilson et Lafleur, Montréal) – insistent sur la complexité et même l’imprécision de certains canons du Code relatifs au pouvoir de gouvernement dans l’Église. Le site Cedregi s’efforce de présenter le plus clairement possible le droit régiminal de l’Église, et il sera reconnaissant à toute personne qui voudra bien l’aider dans cette perspective, pour le thème ici abordé et pour tous les autres, passés et à venir.



Conception site : pierrezeiher@sfr.fr                                                                                                               Mise à jour  23 mars 2013